Hors de l’eau

Nous traversons tous des moments de marasme, des périodes où l’on ne sait plus comment tenir la tête hors de l’eau. Certains en parlent, d’autres non. Soit par fierté, soit qu’ils estiment qu’en parler revient à ressasser encore et encore et préfèrent évoquer, en autruche, les quelques soleils qui parsèment leurs journées. 

Dans ces moments de profonde détresse, on cherche une bouée, n’importe laquelle, quelque chose pour tenir encore un peu, juste encore un peu, le temps que le vent fasse demi-tour, il fait toujours demi-tour.

Il suffit parfois d’un rien, un acte minuscule, un appel surprenant à l’exact bon moment… Oui, un simple appel, une personne pas si proche qui vous déclare tout-à-trac « Je t’aime », parce que c’est Noël, parce qu’elle n’a pas eu de vos nouvelles ou juste parce qu’elle le pense à cet instant. 

Ne soyez pas avares de vos sourires, n’ayez pas la pudeur de vos sentiments, n’attendez pas forcément une occasion, une nécessité…  

Ne vous fiez pas au rire ravageur, à la bonne humeur de cet ami ou de celle-ci à qui il semble que tout réussi.

Ce n’est pas toujours celui qui pleure le plus fort qui traverse les plus grands chagrins, il est des noyades silencieuses qui ne font pas même le murmure d’un clapotis. 

Et ce sourire que vous offrez, et ces trois mots que vous prononcez, pourraient bien être la bouée qu’ils attendaient. 

À Coeur Pendu – Recueil de poésie suivi de Eros & Haïkus (Haïkus érotico-humoristiques)

Roulements de tambour, trompettes et coupettes, À coeur pendu, mon recueil de poésie, est là et bien là après des mois de tergiversations, préparations, attente, illusions, désillusions et illumination (mon cerveau ne connaît guère la sobriété énergétique, et j’ai souvent des coups de chaud).

À coeur pendu, recueil de poésie par Audrey Debuysscher

À coeur pendu, illustrations et poésie

L’idée était sans doute un poil ambitieuse que d’illustrer une partie de mes poèmes et de les réunir dans un recueil mais l’envie fut plus forte et, puisque j’ai réalisé un certain nombre de dessins et calligrammes pour le collectif Lorderey, ils étaient en partie existants (en affiches notamment, si tu es curieux et que tu cherches un cadeau de Noël original, tu peux aussi aller voir les impressions sus-citées).

Affiche calligramme Lorderey

À coeur pendu, érotisme et liberté

Tu le sais, lecteur en sueur, je participe depuis plusieurs années au Prix de la Nouvelle Érotique et je ne suis donc pas des plus réservées dans les écrits porteurs de fantasmes, de corps et de liberté. Alors non, cet ouvrage n’est pas adapté aux enfants (contrairement aux Fleurs roses du papier peint qui fut étudié en classe de CM1). Pour autant, hormis la dernière partie (Eros & Haïkus), il n’y a pas non plus de quoi s’offusquer.

À coeur pendu, c’est un recueil de poésie explorant le féminin, l’attachement et la dépendance affective jusque dans la chair et l’âme. C’est une ode à l’amour sous toutes ses formes mais également, en filigrane, au choix, à la libération même si cette dernière peut parfois prendre la forme d’une soumission. 

Expo et dédicaces

Et comme un bonheur ne vient que rarement seul, entraînant un autre dans ses pas, j’ai la joie d’exposer deux fois en cette fin d’année :

Le 17 décembre prochain à la Galerie Reca à Ballaison, dès 15h00 (voir événement sur Facebook)

Le 23 décembre prochain à Yvoire dès 11h00 (voir événement sur Facebook)

Vous pourrez y découvrir mes affiches ainsi que le recueil (et mes autres livres) que je me ferai un plaisir de vous dédicacer.

Jaune

soleil

On a traversé la France de part en part en se laissant déposer là où le vent le décidait.

Partout le même triste constat : chaleur écrasante, champs brûlés par le soleil, jaune, tout était jaune et buriné, même là où l’herbe est réputée plus verte qu’ailleurs.

On a traversé la France de part en part, de l’extrême sud à la Normandie, sans trouver de verdure, jaune, tout était jaune, même là où les nuits fraîches offrent encore un peu de rosée aux champs épuisés.

On a traversé la France de part en part, cherchant les coins sauvages pour vivre sans chaussures, marcher pieds nus, danser dans l’herbe, plaisir sensuel annuel qui ramène à l’essentiel, jaune, l’herbe était jaune et coupante comme des échardes de bois. 

On a traversé la France de part en part, cherchant à fuir la chaleur mais ne trouvant de fraîcheur nulle part, hormis dans quelques rivières gonflées par des glaciers délités et dans lesquelles nous nous sommes jetés, nus, éreintés. 

On a traversé la France de part en part pour se mettre au vert mais jaune, tout était jaune et brulé.

Vie Vent

Du vent !
Vie vent !

Il y a ce vent que plus personne ne prend la peine d’écouter.

Il y a ce vent qui t’emmène dans les profondeurs des forêts,

Tambour battant, coeur en apnée, 

Il y a ce vent, ce vent qui réveille et souffle les pires conseils.

Il y a ce vent, qui vient chercher tes instincts, ton animalité.

Il y a ce vent qui souffle sur ta peau, ce vent qui soulève, te soulève à te renverser.

Il y a ce vent qui t’invite, te pousse, t’exhorte à danser.

Il y a ce vent qui t’envole jusqu’aux toits pour danser. 

Il y a ce vent qui hurle au corps comme le chien hurle à la mort. 

Il y a ce vent, et il y a les corps soudain vivants. 

Nulle part ailleurs

Il y a des gens que j’aime d’un amour qui n’existe nulle part ailleurs dans mon cœur. 

Des gens que j’aime pour leur rare loyauté et leurs valeurs. Des gens animés par la conscience de leur brève existence, par l’urgence de semer la bienveillance et la beauté.

Ce n’est pas un amour charnel, fraternel ou maternel, c’est un amour d’âme.

C’est un amour pur, un amour originel. 

Ils pansent leurs blessures en pensant les autres, ils battent l’injustice au rythme de leur cœur. Leur droiture ne faillit pas et, si toutefois elle s’émousse, ils n’ont de cesse de réparer leur erreur. 

Il y a des gens que j’aime d’un amour qui n’existe nulle part ailleurs dans mon cœur. 

Des gens devant lesquels je peux me présenter nue sans craindre pour ma pudeur. Ils défont leur manteau pour m’en envelopper.

Ils répondent aux questions les yeux droits dans le cœur, ils ne détournent rien, même à leur faveur. 

Il y a des gens que j’aime d’un amour qui n’existe nulle part ailleurs dans mon cœur. 

Parce qu’ils ont l’humanité et un code d’honneur, parce qu’ils ont la fidélité et les actes des grands seigneurs. 

Fin janvier

J’aime le soleil de fin de journée.

Le soleil de fin janvier, au moment où il est prêt à décliner.

La nature qui lutte pour se réveiller.

J’ai profité de ce soleil de fin de journée,

J’ai absorbé la forêt, son contenu, son contenant.

J’ai fureté, j’ai flâné, j’ai musardé. 

Et puis je suis rentrée, les joues rosies, le nez glacé.

Je suis rentrée, à l’heure où le ciel rougeoie comme le sang,

Les doigts en proie au fourmillement de la chaleur retrouvée.

J’ai profité d’un instant, calme, sans bouger.

J’ai allumé des bougies, des lampes, de l’indirect, du non violent,

Pour conserver la luminosité chaude de la forêt dans le soleil de fin janvier. 

« Mets-nous un peu de soleil, Minouche », ai-je prononcé,

Réveillant la mémoire de ma grand-mère qui enjoignait son mari d’allumer dedans ce qui disparaissait dehors,

Je me suis assise sur le canapé, Joep Beving en fond sonore. 

J’aime le soleil des fins de journées de janvier.

Un soleil trompeur dont la couleur mime la chaleur.

J’aime le soleil des fins de journées de janvier. 

Il porte la promesse de toutes les futures douceurs.  

Se souvenir des petites choses

On vit dans le souvenir des grands événements et dans l’attente des suivants.

On vit dans le souvenir des grands événements et dans l’attente des suivants, oubliant que ce sont les moments anodins, les petits riens du quotidien qui en sont les ponts, qui en font le chemin.

Que ce sont ceux-là qu’il convient de soigner, d’entretenir et de provoquer, et de savourer.

Nourrir les riens du quotidien, les joies minuscules, les bonheurs lilliputiens, lesquels, à force de grandir, à force de fleurir, de se cumuler, de s’amonceler, en viendront à nous dépasser et sans même que l’on n’y prête la moindre attention, permettront aux grands d’advenir.

Le beau, le grand, il faut aller le chercher dans l’infinitésimal, dans le discret, c’est là qu’il est caché.

Et dans les moments compliqués, se souvenir de ce qui fut, de ce qui sera sans perdre de vue ce qui est, là, à portée.

Faire que son herbe soit plus verte qu’ailleurs en l’enrichissant de son amour jour après jour, en conservant son regard premier, celui encore emprunt de sa naïve découverte.

On vit dans le souvenir des grands événements et dans l’attente des suivants, oubliant que ce sont les moments anodins, les petits riens du quotidien qui en sont les ponts, qui en font le chemin.

Parce que ce qu’il subsistera, à la fin, au moment de se retourner une toute dernière fois sur sa vie et son passé, ce qu’il y aura, à la fin, ce sera avant tout, surtout, par dessus tout, les souvenirs d’une vie construite sur le quotidien.